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dimanche 13 octobre 2013

Industriels et banquiers sous l' occupation nazi...

JPEG - 36.5 koIndustriel et banquiers français sous l’occupation
de : Jacques-Marie BOURGET
jeudi 10 octobre 2013 -
Industriels et banquiers français sous l’occupation. (Éditions Armand Colin. 816 pages. 35 euros)
Grands ou petits savants, chercheurs, étudiants ou simples passionnés d’histoire, si vous fouillez dans une salle d’archives et qu’un grand carton se met à bouger, n’ayez pas peur, c’est Annie Lacroix-Riz qui vit à l’intérieur. Dans le monde des dépouilleurs, de notes, rapports, mémoires ou pactes, cette obsédée du document est médaillée aux J.O de la connaissance par le grimoire. Mais pourquoi Annie Lacroix-Riz - qui nous sert aujourd’hui le plat glacé, la cigüe d’un livre « Industriels et banquiers français sous l’occupation » (éditions Armand Colin)- a-t-elle besoin de s’abriter derrière la vérité des traces écrites laissées par les acteurs de l’histoire ? C’est que la dame n’est pas l’amie de tout le monde. Ancienne élève de Normale Sup et professeur émérite à Paris 7, elle reste un penseur en quarantaine. Pour la détester, parfois la diffamer, nous avons d’ un côté les industriels et banquiers, toujours en place, dont les ascendants sont mis à nu. Et certains, nous a démontré l’historienne, en France pendant la seconde guerre, ont consciencieusement produit ce Zyclon B qui était l’outil de la « solution finale ». A minima, tous ces bons gestionnaires ont collaboré « économiquement » au bonheur de l’Allemagne. L’autre « ennemi » d’Annie Lacroix-Riz, c’est la pensée unique. Celle de ses collègues qui tiennent les clés de coffres vides, ceux de l’histoire officielle. Tous, à l’époque où « c’était porteur » ont pris leur carte au PCF. Avant d’écrire « mon dieu quelle horreur », au moment où les soviets passent de mode. Lacroix-Riz, sans renoncer, sauf à sa carte du PC, continue fièrement de labourer le sillon marxiste. Il ne conduit ni aux pages culture du Monde ni à un emploi de consultant au FMI.
Les tranchées étant creusées, que nous dit l’historienne qui, en 1999 avant l’ouverture des archives de l’instruction des procès faits aux ministres de Vichy, avait déjà abordé le sujet ? Dans son premier opus elle laissait une toute petite porte ouverte sur le doute : « après tout, les industriels et banquiers, en tous cas certains, n’ont peut-être collaboré que menacés d’un pistolet sur la tempe … ». Du volume d’aujourd’hui, lourd de 816 pages, tombe le verdict : « non la collaboration économique, sauf exception, n’a rien eu de forcé ». Mieux, elle fut une jubilation pour ces « managers » qui, par la nouvelle Europe avec à sa tête le grand Reich, vivaient une première forme de mondialisation.
Révolution économique qui serait une divine surprise apportée dans les banques et usines par les fourgons d’Hitler ? Pas du tout, nous dit Lacroix-Riz. L’entente, le premier tissage des liens, l’élaboration du rêve remontent bien avant l’invasion de la France. Avant même l’arrivée du chef nazi comme chancelier, nombre de représentants des « 200 familles » trouvaient que ce révolutionnaire avait de bonnes idées. Après 1936, au motif que « mieux vaut Hitler que le Front populaire », le patronat a choisi le modèle allemand avant qu’il ne débarque sous l’Arc de triomphe.
Les entrepreneurs nazis installés en France, on à assisté, Lacroix-Riz nous le montre, à la création de cartels, au pillage de matières premières et de produits fabriqués qui prenaient la couleur de l’Europe nouvelle en prenant le train pour Berlin. Les « capitaux juifs », bien sûr, devenant aryens dès qu’un collabo français les livrait à l’édification du III e Reich. Sainte pudeur, ne parlons pas des biens coloniaux pillés par l’Allemagne jusqu’en Afrique, grâce à la bonne volonté et au zèle du patronat français…
Dans les usines de l’hexagone, celles qui tournaient encore, il s’agissait de mouiller sa chemise pour le bien des hommes nouveaux. Avec une politique sociale exemplaire : baisse des salaires, concentration du capital et hausse des profits. Pour expliquer la douleur, le maître de l’usine accusait le poids de l’occupant tout en grossissant un bas de laine qui, aujourd’hui encore, n’a pas été détricoté.
La table des matières, et celle des noms cités, est le pire du livre. Le pire pour l’honneur perdu de ceux qui, le 18 août 44, ont eu le temps d’arracher la Francisque de leur veste pour y agrafer le V des FFI. Leurs petits papiers sont là, dans le livre, et pas oubliés. Tels l’œil de la tombe ils les regardent.
Ceux qui estiment qu’un tel livre va faire un foin, provoquer des divorces au motif que le grand père a fait notre fortune, payé notre château, en vendant du beurre aux Allemands, se trompent. Annie Lacroix-Riz, si elle est une femme d’archives, est par là même une historienne de placard : rien ne doit être dit, ou publié sur ces écrits qui ravivent des querelles oubliées, simples incartades du temps. En 1945, grandeur et unité du pays oblige, De Gaulle n’a pas souhaité demander des comptes à des industriels et banquiers fort utiles pour « relever la France ». Et Mitterrand n’a-t-il pas sonné la paix finale depuis le wagon du TGV qui la conduit de Vichy à l’Élysée. Avec Bousquet en chef de gare.

2 Commentaires
Industriel et banquiers français sous l’occupation par Arnold 
Pour prolonger, je vous recommande aussi la lecture de "Big Business avec Hitler" de Jacques R. Pauwels éditions aden.
La 4e de couverture :
Hitler a comblé les attentes qu’industriels et banquiers avaient placées en lui. En effet, il réalisa tous les points importants de leur "programme" plus diligemment, plus complètement et plus impitoyablement qu’ils auraient pu ou osé le faire eux-mêmes.
En outre à, à l’issue de 12 années d’une dictature nazie dont ils avaient pourtant été les parrains, banquiers et industriels rejetteraient tous les crimes sur le dos d’Hitler et plaideraient pieusement "non coupables".
Ce livre d’histoire bien documenté est de ceux dont l’élite économique ne souhaite pas entendre parler"
.
Par ailleurs sachez que "Le mythe de la bonne guerre" du même auteur vient d’être réédité. Formidable bouquin où l’on apprend par exemple les raisons pour lesquelles les américains évitaient de bombarder les usines Ford en Allemagne ou bien comment les pétroliers ricains ont fournis près de 90 % du pétrole à Hitler.

Industriel et banquiers français sous l’occupation par Arnold
La Deuxième Guerre Mondiale, une croisade américaine pour la défense de la liberté et de la démocratie ? Les vainqueurs écrivant l’histoire, c’est cette version qui est enseignée depuis 1945 des deux côtés de l’Atlantique.
Jacques Pauwels, preuves à l’appui, dévoile le mythe de la « libération ». Aux États-Unis, Hitler a très longtemps été considéré comme un excellent partenaire en affaires mais dans une guerre qui ne se déroule pas comme prévu, les alliances finissent alors par se former contre les « mauvais ennemis », avec les « mauvais alliés »...
Le débarquement de Normandie qui ne survient que très tard, le 6 juin 1944, fera malgré tout de ce second conflit mondial une formidable aubaine financière pour les États-Unis. En libérant une partie de l’Europe des fascistes pour la « dominer » économiquement, toutes les conditions sont également réunies dès 1945 pour entamer une très longue Guerre froide...
Un livre incontournable sur l’Amérique et la Seconde Guerre mondiale
MCD a rencontré son auteur, le professeur canado-gantois Jacques Pauwels.
Jacques Pauwels. Aux États-Unis, on présente les guerres de Corée et du Vietnam comme de mauvaises guerres. Mais la Seconde Guerre mondiale était une bonne guerre. Ses motivations étaient « pures » et on s’en allait au combat pour la paix et la justice. C’est aussi l’image présentée par Hollywood dans des films comme Le jour le plus long et Un pont trop loin. Je pose la question : Pour qui cette guerre a-t-elle été bonne ?
Pour les entreprises de l’Allemagne nazie, la guerre a été une source de profit exceptionnelle. La General Motors et Ford ont fait des bénéfices énormes. Opel et Ford-Werke, leurs filiales allemandes, ont contribué à la construction de véhicules militaires pour la Wehrmacht et d’avions pour la Luftwaffe. Texaco et Standard Oil ont participé à la livraison de carburant pour les chars et les avions.
Ces mêmes entreprises ont également fait des affaires en or avec la Grande-Bretagne. L’industrie américaine a soutenu tous les belligérants. On a produit Jeeps, camions et avions à la chaîne. Le chômage a baissé et les bénéfices ont grimpé. En outre, la Seconde Guerre mondiale a ouvert toutes grandes les portes du monde entier aux marchandises et aux capitaux américains.
Les industriels américains n’étaient-ils pas horrifiés par le fascisme ?
Jacques Pauwels. On ne peut comprendre leur attitude à l’égard du fascisme que lorsqu’on comprend l’attitude de l’élite envers le communisme. Chez beaucoup d’Américains est née une sorte d’enthousiasme pour une alternative révolutionnaire après le succès de la révolution russe. Le péril rouge était une épine dans l’il de l’élite industrielle. Les journaux du magnat de la presse Hearst ont diffusé massivement la haine à l’égard du bolchevisme. L’Italie et l’Allemagne semblaient proposer une bonne échappatoire à la force croissante du communisme. Les journaux du groupe Hearst vantaient l’Allemagne de Hitler en tant que bastion contre le communisme. Et Hitler suivait les règles du jeu capitaliste : aucune entreprise ne fut expropriée ou nationalisée. Le fascisme était bon pour les affaires et, par conséquent, les hommes d’affaires américains étaient les amis du fascisme. Le grand patron de Texaco, Torkild Rieber, par exemple, admirait Hitler et était l’ami de Göring, le numéro deux du Troisième Reich.
Par la suite, l’Union Soviétique est devenue une « alliée utile », aux yeux des Américains. L’Armée rouge faisait face sur le front de l’Est alors que les pertes américaines restaient limitées
Jacques Pauwels. À l’origine, la direction de l’armée américaine pensait que l’armée allemande allait entrer dans l’Union soviétique comme dans du beurre et la vaincre en quelques semaines. Mais, le 5 décembre 1941, il se passe une chose que personne n’aurait imaginée. Non seulement l’armée soviétique réduit la machine de guerre nazie à l’immobilité, mais en plus, ce jour-là, elle passe à la contre-attaque. Ce fut le tournant de la guerre.
Quand l’industrie américaine comprend que le gouvernement soviétique ne va pas se retrouver à genoux, elle reçoit un nouveau partenaire commercial : Moscou. Dès ce moment, les Américains deviennent « antifascistes », mais ils restent naturellement anticommunistes. Le futur président Truman a dit à l’époque : « Si l’Allemagne gagne, nous devons aider la Russie et si la Russie gagne, nous devons aider l’Allemagne, ainsi il en mourra le plus possible dans les deux camps ennemis »
Les Américains entrent en guerre sans le vouloir lorsque Hitler leur déclare la guerre après l’attaque surprise japonaise contre Pearl Harbor. Brusquement, l’Union soviétique se mue en alliée et la presse met son anticommunisme quelque peu en veilleuse. L’Union soviétique est un partenaire mal aimé mais très utile. 90% des pertes allemandes sont à porter au compte de l’Armée rouge. À Stalingrad, l’armée allemande reçoit un coup dont elle ne pourra plus se relever : 300000 hommes sont taillés en pièces.
Après Stalingrad, tout est différent, l’Armée rouge s’est mise en route pour Berlin. Personne ne parle de l’enjeu politique du Jour le plus long ou D-Day, le débarquement de Normandie tant attendu. Le débarquement était censé donner aux alliés la possibilité d’atteindre Berlin avant l’Armée rouge.
Dans votre ouvrage, vous parlez de ce qu’on a appelé l’option allemande, la possibilité d’un changement d’alliance avant même que la guerre soit terminée. Le général Patton et le sénateur Taft ont proposé de foncer sur Moscou en compagnie de la Wehrmacht. Quel était le sérieux de cette proposition ?
Jacques Pauwels. C’était une option attrayante, mais l’opinion publique ne l’aurait jamais acceptée. Pas en Europe, et pas aux Etats-Unis non plus où, entre-temps, l’Armée rouge avait acquis beaucoup de prestige auprès du peuple et auprès des GI.
Mais les Américains ont laissé l’armée allemande intacte. Et ils ont encouragé les officiers allemands capturés à rédiger des rapports sur leurs expériences en Union soviétique. Par la suite, ils ont également transféré des espions nazis comme Reinhard Gehlen en Amérique, et même pris sous leur protection des criminels de guerre comme Mengele et Barbie en vue de les utiliser contre le communisme. Les partisans italiens ont été désarmés et mis hors-jeu. Le maréchal Badoglio, ancien collaborateur de Mussolini, a pu diriger le premier gouvernement italien de l’après-guerre.
Comme par magie, l’Union soviétique redevient le grand épouvantail du « monde libre ». Pour l’intimider, les alliés anéantissent Dresde, une ville sans la moindre utilité militaire, au moyen de 750000 bombes au phosphore. Pour la même raison, ils larguent des bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki. Ce faisant, les Américains entament leur nouvelle guerre, la guerre froide. Et, un demi-siècle durant, ils ont tenu le reste du monde sous l’ombre glaciale d’une possible guerre nucléaire.
Aux États-Unis, une théorie a la peau dure. Toute l’histoire s’expliquerait à l’aide de quelques grands noms : l’Amérique, c’est Roosevelt, l’Allemagne Hitler, etc. Il n’en va pas ainsi, bien sûr. L’histoire n’est pas une question d’actes héroïques des grands dirigeants. C’est une question de forces économiques et sociales qu’un historien se doit de rendre compréhensibles. J’ai fait un survol de la guerre, une synthèse qui s’intéresse plutôt à l’ensemble qu’aux détails.
APL